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Graines de voyages à découvrir

lundi 20 janvier 2020

Je te maintiens en vie

Si ce gobelet de café pouvait parler, il vous dirait le nombre d'heures où j'ai arpenté ces couloirs en le serrant fort entre mes doigts.
Je m'accrochais à lui comme on s'accroche à la vie, d'abord de l'ascenseur jusqu'aux portes automatiques, un instant pour prendre du courage et dès qu'on entre dans le service gériatrie, c'est un autre monde qui s'ouvre où la vie perd sa lumière à chaque pas.
Cette odeur qui prend les tripes, ces corps décharnés qui se contorsionnent, ses appels de détresse.
Et puis, j'arrive à ta chambre, en général, il ne faut que quelques minutes pour savoir si tu es avec moi.
Si tu me demandes des nouvelles de ma fille, je sais que tu es là et que l'amour viscéral que lui porte te donne la force d'être là.
Parfois tu n'es pas là, j'écoute patiemment tes hallucinations ou tes propos désordonnés, je prends des nouvelles des personnages imaginaires qui trottent dans ton esprit.
Je dois avouer que depuis quelques mois, tu disparais chaque jour un peu plus.
Tu retournes à l'hôpital après seulement 4 jours à ta maison et tu n'as plus le courage ni la volonté de vivre. Je le sens et tu l'exprimes de plus en plus.
Tu as l'impression d'être un fardeau alors je te rassure.
Mais je sais qu'à ton âge que se soit maman et moi, par nos mesures de prévention ou de la part du personnel médical par leurs protocoles, nous ne faisons que te maintenir en vie.
Je regarde ton corps fatigué et usé, j'entends ton esprit s'embrouiller, je vois tes yeux qui se ferment et qui luttent pour ne pas sombrer.
Parfois je comprends que tu souhaites mourir. Une partie de toi est déjà morte il y a 10 ans avec le décès de mamie et le survivant que tu es voudrais du répit.
Parfois, égoïstement, j'aimerais te voir continuer à te battre pour ne pas te perdre car on a beau savoir que l'échéance approche, on est jamais préparé.
On est jamais prêt à accueillir la vie ou la mort.
Elles nous surprennent, elles nous submergent, elles nous chamboulent une partie de nous même.
Je quitte ta chambre ce jour-là, le soleil d'hiver réchauffe la pièce, tu es allongé dans ton lit, je tiens ta main, je caresse tes cheveux et tu t'endors.




Je rentre à la maison, le moral dans les chaussettes.
Ma fille me saute dessus et m'offre un bisous qui transpercerait ma joue s'il le pouvait !
Elle m'invite à jouer, je deviens un personnage qui part à l'aventure dans un autre univers.
Au début, ce n'est pas facile et puis au fur et à mesure, je m'évade avec elle.
Je me rends compte de ce pouvoir magique, grâce à son amour, à sa joie, à son imagination, je m'extrais de ma peine, elle me donne une force insoupçonnable.



Je ramène à l'hôpital une photo de ma fille, j'ai espoir que son sourire aura le même effet sur toi.
Je ne sais pas dans combien de temps nous serons séparé toi et moi, est ce une question d'heures, de jours, de mois, d'années?
J'espère au fond de mon cœur que si les derniers instants de ta vie sont semés de difficultés, ma présence et mon amour les auront rendus plus doux à vivre.
Dans mon cœur pour toujours.






"On ne retient pas l'écume
Dans le creux de sa main
On sait la vie se consume
Et il n'en reste rien
D'une bougie qui s'allume
Tu peux encore décider du chemin
De ton chemin



Crois tu que tout se résume
Au sel d'entre nos doigts
Quand plus léger qu'une plume
Tu peux guider tes pas
Sans tristesse ni amertume
Avance, avance puisque tout s'en va
Tout s'en va



Tu trouveras le soleil
Dans le cœur des enfants
Sans nulle autre joie pareille
Ni sentiment plus grand
Un mot d'amour à l'oreille
Peu dans chacun réveiller un volcan
Pour qui l'entend

Yalla"



















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